Le pic du Taillon, dans le cirque de Gavarnie, se dit être le 3000 le plus accessible. Il n’est pas pour autant sans danger. C’est une randonnée qui demande de l’expérience, une bonne condition physique et de la préparation. Même si la plupart des randonneurs vous diront qu’il n’y a aucune difficulté, je préfère jouer la carte sécurité. Chacun appréhende le danger différemment, mais il faut retenir que c’est une randonnée de niveau 3 sur 4, ce n’est pas rien. Il faudra également prendre en compte les conditions météo et la période sur laquelle vous comptez faire l’ascension. Mais rentrons dans le vif du sujet avec mon « récit topo » qui vous aidera dans votre préparation.
Un rêve d’enfant.
Je me souviens parfaitement de la première fois où j’ai découvert le cirque de Gavarnie. Je suis avec mes parents assis à la terrasse d’un bistrot du petit village. Je sirote un coca face à cette vue imprenable de la grande cascade et je regarde passer les randonneurs qui en reviennent. Ils ont pour la plupart les cheveux longs avec une barbe hirsute, sans oublier le mini short de Michel Platini. Les traits du visage sont marqués par la fatigue. Je n’ai aucune idée d’où ils viennent réellement, mais je les regarde avec mes yeux d’enfant comme s’ils étaient des héros.
Mes parents me montrent alors sur une carte les différents sommets et points notables comme le mont Perdu, le Casque, le Marboré et… La Brèche de Roland.
Ce dernier lieux me résonne dans la tête, ils me racontent la légende, c’est validé, c’est là que je veux aller quand je serai grand.
On se lance.
30 ans plus tard et 10 années de randonnées dans les jambes, je n’ai pas les cheveux longs ni le mini short de Michel Platini, mais j’ai bien la barbe hirsute. Mon rêve est toujours présent, il est temps de l’accomplir. Après plusieurs séances de footing le week-end et des heures à étudier le topo, les récits et même des vidéos sur you tube, je me sens prêt. Un dernier coup de téléphone à mon ami Mika pour voir s’il est toujours ok et nous partons.
Les infos en bref.
- Pays : France
- Massif : Pyrénées
- Département : Hautes-Pyrénées
- Commune : Gavarnie-Gedre
- Niveau : Randonneur
- Durée A/R : 4h30 pour la brèche de Roland, 6h15 pour le Taillon.
- Altitude : 2807m pour la Brèche, 3144m pour le Taillon
- Dénivelé : 843m pour la brèche, 1005m pour le Taillon
- Rando canine : Non, les animaux ne sont pas autorisés dans le Parc National des Pyrénées
- Carte : IGN n° 1748 OT, Gavarnie-Luz.
Difficultés : En début de saison (Mai-Juillet) le glacier de la Brèche demande l’usage des crampons et piolets. Il y a des traversées sur névé, le passage de la cascade est extrêmement glissant. Quelques mètres délicats entre la Brèche de Roland et la fausse Brèche,(chute de pierre, arête étroite) il faut redoubler de vigilance, la chute peut être fatale. Période conseillée : Septembre.
Pour s’y rendre.
Depuis l’entrée de Gavarnie, suivre la route en direction de la station des Especières jusqu’à son terme. Vous êtes arrivés, bienvenue au col des Tentes.
C’est parti !
Comme nous avons coutume de le faire lorsqu’on part uniquement pour un week-end, on prend la route directement à la débauche le vendredi soir pour attaquer le samedi matin. À notre arrivée, la nuit est déjà tombée, elle est bien fraîche, on dormira dans la voiture. Un ciel parfaitement dégagé et étoilé nous permet d’avoir une vue sur le pic du Taillon, le monstre à vaincre.
7h00 du matin, le réveil retentit. Nous n’avons pas beaucoup fermé l’œil de la nuit, l’excitation était bien trop grande. On se prépare un petit déj énergétique à base de diverses céréales, flocons d’avoine et jus d’orange. J’aperçois au loin les lampes frontales de certains randonneurs qui sont partis plus tôt.
On se met en marche, on passe la petite barrière en bois pour suivre une petite route goudronnée jusqu’au « port de Boucharo ».
On prend le sentier balisé par le parc national qui passe à la base du Gabietou, puis à la base du Taillon. Le sentier est essentiellement constitué de roches, ici la végétation n’a pas sa place. On marche plutôt facilement, le sourire aux lèvres, on admire le jour qui se lève doucement sur ce paysage absolument fabuleux. On atteint la cascade alimentée par le glacier du Taillon. C’est une partie très délicate, les roches sont glissantes et c’est peu de le dire. Parfaitement au courant, je préviens Mika derrière moi.
Attention Mika ! ici, ça glisse énormément !
Mais c’est moi qui tombe… Une douleur très vive dans le bras, je serre les dents, je grimace, j’ai peur d’avoir cassé mon avant-bras. Heureusement pour moi, ce n’est pas le cas, mais je garderai cette douleur durant trois jours. Dans tous les topos que j’ai pu lire, ils mentionnent la présence de chaînes pour aider à franchir ce passage, mais il n’y en avait pas…
On reprend la marche, on prend du dénivelé, on souffle et on tire sur les mollets. Le glacier du Taillon est maintenant visible sur notre droite. On entend au loin des pierres qui se décrochent et tombent dans un fracas peu rassurant. Nous arrivons au refuge des Sarradets, 2587m.
Pour ceux qui souhaitent avoir une belle vue sur la brèche de Roland, sans trop d’efforts, vous pouvez vous arrêter là. Pour toutes informations concernant le refuge cliquez-ici.
Nous en profitons également pour y faire une pause, car c’est maintenant qu’on rentre dans le vif du sujet. En arrière-saison, comme pour nous en septembre, le glacier n’est plus un problème. Il a énormément réduit et le passage ne pose plus de soucis, en revanche la pente s’accentue véritablement et nous marchons dans une sorte de grave très fine qui me fait penser à la litière pour chat. Vous l’avez compris, le sol se dérobe, on s’enfonce à chaque pas et on souffle à pleins poumons.
Nous sortons enfin de cette « litière » pour arriver sur une large dalle, où l’on y trouve tout un tas de cairn. On reprend notre souffle et on attaque la dernière ligne droite pour la brèche. La dernière partie se présente comme un mur, on doit y mettre les mains pour monter, mais rassurez-vous ce n’est pas non plus de l’escalade. Encore quelques mètres et… Ça y est ! Nous y sommes !
Je me revois enfant avec mon coca à contempler la brèche sur un dessin, cette fois j’y suis , je la franchis et j’ai une vue sur l’Espagne à couper le souffle. D’ailleurs, j’ai tellement du mal à le reprendre qu’on fait une pause. 🙂 ( 2807m).
Après un court répit, on reprend la marche pour ne pas se couper les jambes, car ce n’est pas fini, maintenant direction le Taillon. Pour ce faire, une fois avoir passé la brèche, vous prenez à droite et suivre le sentier bien visible dans les éboulis. On longe les murailles du pic Bazillac (attention aux chutes de pierres), pour arriver ainsi au Doigt de la Fausse brèche. On la contourne par le versant Nord. Attention à ce passage très délicat, même en septembre, il y avait encore de la glace, c’est étroit avec un ravin vertigineux sur votre droite.
On arpente maintenant une crête étroite mais bien linéaire en direction du Taillon, il est là face à nous. On entre dans la dernière phase, en s’élevant dans une série de lacets sur les pentes du pierrier sommital et… Nous y sommes !!! Le Taillon 3144m avec un panorama digne d’un 3000m.
Le retour se fait par le même chemin, et nous nous mettrons en marche rapidement, on a encore un sacré morceau à faire. Je vous recommande de partir très tôt le matin, pour pouvoir profiter pleinement et ainsi avoir le temps de redescendre sous peine de devoir marcher de nuit ou avoir une météo défavorable en fin de journée. Chose qui arrive régulièrement. Je vous laisse en image, avec une petite vidéo sur les crêtes, juste avant le sommet.
Je vous dis à bientôt sur Randonnée Nomade.
Fred.
Voir les commentaires (1)
Tu m'as clairement donné envie. Je cherchais un sommet accessible dans les 3000 mètres, mais je ne trouvais pas.
Un grand merci à toi, grâce à ton article tu vas me faire réaliser un rêve : Mon premier 3000 mètres, après des années de rando en moyenne montagne.